Exposition de 1984
1984
Pendant cinq semaines, Bex accueille les œuvres des sculpteurs suisses contemporains. D’étranges profils peuplent nos parcs : symboles et témoins tout à la fois de notre époque, tourmentée et paradoxale, ils s’allient merveilleusement avec le décor naturel. Peut-on rêver plus bel écrin que la nature, éternelle créatrice, pour ces muettes interrogations, ces reflets fugaces de vérité, immortalisés dans le métal ou la pierre ?
Bex & Arts : une rencontre entre l’art et le paysage, mais aussi et surtout, entre l’art et les gens qui vivent, ici, en 1984.
Aimé Desarzens, syndic de Bex
« …C’est que, depuis trois mille ans, on ne sculpte que des cadavres. Parfois on les nomme gisants et on les couche sur des tombes ; d’autres fois on les assied sur des chaises curules, on les juche sur des chevaux. Mais un mort sur un cheval mort, cela ne fait même pas la moitié d’un vivant. Il ment ce peuple des Musées, ce peuple rigide, aux yeux blancs. Ces bras prétendent bouger, mais ils flottent, soutenus entre haut et bas par des tiges de fer ; ces formes figées ont peine à contenir en elles un éparpillement infini ; c’est l’imagination du spectateur, mystifié par une grossière ressemblance, qui prête le mouvement, la chaleur, la vie à l’éternel affaissement de la matière. Il faut donc repartir de zéro. Après trois mille ans, la tâche de Giacometti et des sculpteurs contemporains n’est pas d’enrichir les galeries avec des œuvres nouvelles, mais de prouver que la sculpture est possible. De le prouver en sculptant, comme Diogène, en marchant, prouvait le mouvement. De le prouver, comme Diogène, contre Parménide et Zénon. Il faut aller aux limites et voir ce que l’on peut faire. Si l’entreprise devait mal finir, il serait impossible, dans le cas le plus favorable, de décider si cela signifie l’échec du sculpteur ou celui de la sculpture : d’autres viendraient, qui devraient recommencer… »
Sartre, Situations, Il
